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Carrie, la vengeance (Kimberly Peirce, 2013)

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PIFFF 2013 : nuit Stephen King

Plus de 10 ans après la médiocre version TV de David Carson, avec Angela Bettis, plus de 35 ans après le chef d’œuvre de Brian De Palma, le roman Carrie de Stephen King se paye une nouvelle adaptation. Si le choix de Kimberly Peirce à la réalisation n’est pas une si mauvaise idée sur le papier, le résultat s’avère passablement honteux, entre vulgaire copié/collé et ajouts qui travestissent complètement le sens du récit. Sans compter que Chloë Grace Moretz est sans doute un des pires choix possibles pour incarner Carrie.

Dans Carrie, la vengeance, tout fout le camp dès la séquence d’ouverture. Chez De Palma, outre la démonstration de mise en scène de la séquence du vestiaire, l’ensemble de son propos s’affichait déjà à l’écran de façon frontale. Chez Kimberly Peirce, en ouvrant le film sur l’accouchement de Julianne Moore, un tout autre ton est donné, celui d’un film d’horreur lambda sans la moindre identité, sans discours travaillé. La suite reprend une structure identique à l’original, à laquelle viennent s’ajouter des éléments qui tentent vulgairement d’ancrer le film dans une certaine modernité. Au rayon des ajouts majeurs et gentiment grossiers, l’utilisation des téléphones portables et de youtube comme nouvel outil d’humiliation publique. Ça ne va pas plus loin, tandis que le décor du lycée et les personnages désincarnés qui l’habitent semblent sortir tout droit d’un casting de Glee. Film d’horreur insipide produit de son époque et destiné à un jeune public avant tout, Carrie, la vengeance avance ainsi, faiblement, dans les traces d’une œuvre colossale qu’il ne peut même pas rêver toucher du doigt.

Carrie la vengeance 1 Carrie, la vengeance (Kimberly Peirce, 2013)

La volonté de se sortir de l’ombre du film de De Palma se fait bien évidemment sentir. Mais en même temps se dessinent les limites de ce choix jamais naturel. Kimberly Peirce, et le scénariste de Glee Roberto Aguirre-Sacasa, venu se greffer à Lawrence D. Cohen, scénariste de l’original, tentent vainement d’appuyer sur le caractère religieux du récit. Et ce sans aucune finesse, à grands coups de crucifix dans tous les coins du cadre, de psaumes récités par une Julianne Moore en roue libre totale et absolument pas dirigée, et de symboles franchement ridicules à l’écran. A ce titre, le final sous forme de lapidation gigantesque est un monument de n’importe quoi. Mais là où Carrie, la vengeance passe complètement à côté de son sujet, lui préférant un premier degré lisse au possible, c’est à travers le personnage de Carrie elle-même, évidemment. Il est ici question d’une jeune fille qui découvre ses pouvoirs et apprend à les dompter. Il n’est plus du tout question du trouble allégorique du passage du statut de jeune à fille à celui de femme que développait le film de De Palma. En sacrifiant sa profondeur symbolique, le film devient simplement une série B insipide qui n’a pas grand chose à raconter. La scène du bal n’a ainsi plus aucun sens, Carrie étant en plein contrôle de ses actions. Les tourments liés à ce passage à l’âge adulte par le sang sont ainsi évacués avec l’eau du bain, et le film n’a plus rien à raconter. Certaines séquences sont cependant plutôt efficaces même si elles ne servent concrètement à rien, et si elles souffrent d’effets numériques parfois très approximatifs.

Carrie la vengeance 2 Carrie, la vengeance (Kimberly Peirce, 2013)

Mais Carrie, la vengeance se montre parfois très drôle, sans le vouloir. La grossièreté avec laquelle est exploité le symbole de la crucifixion est par exemple à mourir de rire. Mais mieux encore, Kimberly Peirce gratifie son public d’un vibrant hommage à Tex Avery, ou à l’affiche de Ratatouille, avec tous ces ustensiles de cuisine flottant dans les airs, pointés vers la mère de Carrie. C’est plutôt amusant, même si le but n’était pas vraiment celui-ci. Le véritable problème dans tout ça tient bien évidemment dans cette notion de contrôle total des pouvoir télékinétiques de Carrie qui annihile l’essence même du personnage, de ce qu’elle est censée représenter. Le personnage souffre également, comme si cela n’était pas suffisant, de l’interprétation lamentable d’une Chloë Grace Moretz vraiment pas à sa place, sans la moindre étincelle dans le regard et qui fait même un peu de peine à agiter ses mains pour faire voler des objets. Rien ne transpire du film, ni le trouble ni la colère, simplement une basique vengeance sans aucun intérêt. Par ailleurs, le film se plante également à travers son traitement visuel peu inspiré. Là où De Palma faisait se succéder les tours de force, Kimberly Peirce répond par un traitement impersonnel au possible, avec une mise en scène plate et peu inspirée, jamais portée par son sujet. Ce traitement élimine toute empathie envers tous les personnages, marionnettes désarticulées dont le destin ne présente aucun enjeu. Le seul point véritablement positif de ce remake inutile, au delà du fait qu’il n’est ni meilleur ni moins bon que la grande majorité des films horrifiques modernes destinés avant tout à des adolescents peu regardants, c’est qu’il poussera peut-être la jeune génération à se pencher sur Carrie au bal du diable, seule version valable et accessoirement véritable chef d’œuvre du genre.


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